"En visant la perfection, on peut atteindre l'excellence"
Frédéric & Sébastien Suber - Suber Factory
Absolument uniques en leur genre, les miniatures de Suber Factory connaissent un formidable succès auprès des plus grandes stars et des hommes d'affaires les plus puissants du monde. Plus que de l'artisanat, Suber Factory est un trésor national. Rencontre.
Pouvez-vous nous retracer les grandes lignes de votre parcours ?
Frédéric Suber : Passionné depuis toujours par les modèles réduits, j'ai commencé à m'exercer sur les Meccano, le célèbre jeu de construction. Je suis ensuite passé aux maquettes en plastique. Le virus définitivement inoculé, je suis allé de plus en plus loin dans le souci du détail. Le tout en autodidacte.
Après avoir travaillé dans la grande distribution, vous prenez une pause carrière…
Et j'en profite pour peaufiner une maquette qui fut exposée à Automobilia, une brasserie où le "gratin" belge se réunissait. J'y rencontre des collectionneurs, dont un passionné de 911 qui veut acheter ma maquette. Il me propose même de travailler pour lui ! Mais je préfère écouter mon instinct, et créer Suber Factory. C'était en 1994. Depuis lors, je n'ai pas arrêté.
“J'ai écouté mon instinct pour créer Suber Factory, en 1994. Depuis lors, je n'ai pas arrêté.”
Vous êtes littéralement transporté par la passion…
La passion de l'automobile et de la course automobile. Et plus particulièrement pour les années 60, 70 et 80. Si je vois une voiture de compétition, je peux dire qui était à son volant et quand elle a roulé. Je connais également l'histoire des grands pilotes. Je me définis comme un artisan. Ce qui m'intéresse, c'est refaire la mécanique des anciennes voitures. Une Bentley des années 30, c'est tout simplement passionnant. Je veux pousser le plus loin possible le côté artistique de la reproduction d'une mécanique.
Vous travaillez en famille, avec votre fils. Comment voyez-vous l'avenir ?
Très sereinement. C’est avec une grande fierté que j'ai vu mon fils rejoindre l’entreprise en apportant son expertise et tout son enthousiasme. Dans une société, le volet financier se révèle évidemment incontournable. Il faut étudier ses prix en fonction des charges. Heureusement, notre entreprise se développe toute seule. Plus nos créations sont belles, plus les clients sont attirés, et les commandes affluent. Nous comptons près de 200 clients dans le monde. Plus qu'il n'en faut pour écouler notre petite production exclusive. Nous ne subissons donc pas les fluctuations du marché. Au contraire, comme chez Porsche ou Lamborghini, nos ventes suivent une courbe ascendante.
Comment nait un projet Suber Factory?
Un projet est synonyme d'exclusivité puisqu'il comptera entre 12 et 15 pièces. La voiture au centre du projet doit nous enthousiasmer. De par son histoire, son aura, le pilote de légende qui aura pris son volant… Une histoire d'amour doit naitre entre le projet et nous. Parce que je vais devoir créer la voiture, et parce que Sébastien va la reproduire. Quand le projet est lancé, les candidats acquéreurs peuvent se manifester.
Vous utilisez un procédé unique : la méthode Rembrandt…
L'origine remonte à ma passion pour les figurines, que je souhaitais peindre à la perfection. Avec des ombres et du relief, afin de leur donner vie. J'ai étudié les grands maîtres flamands et percé les secrets des tableaux à l'huile. J'ai appris à fondre un pigment. C'est comme cela que j'ai, peu à peu, maitrisé l'art des fondus et des dégradés de couleurs. J'ai ensuite transposé cette méthode sur mes miniatures. Carrosserie, moteur, cuirs… peuvent alors se voir magnifiés. Notre ADN, c'est le pigment. Grâce à lui, nous transmettons une émotion à travers la peinture et le rendu d'une pièce de voiture. C'est pour cela que nous préférons les voitures anciennes. Sur les plus modernes, nous travaillerons davantage le carbone.
“Grâce au pigment, nous transmettons une émotion à travers la peinture et le rendu d'une pièce.”
Vous dites que viser la perfection permet toutefois d'atteindre l'excellence…
Oui, car dans notre esprit, un projet n'est jamais totalement achevé. Nous ressentons toujours l'envie de pousser le souci du détail encore un peu plus loin. Même si, en réalité, le projet se révèle déjà d'une excellente qualité.
Le progrès technologique révolutionne-t-il votre travail ?
Les imprimantes 3D commencent à prendre de la place dans notre atelier. Elles ouvrent de nouvelles portes, tout en facilitant une partie du travail. Par exemple, sur un prochain gros projet, la carrosserie sera faite en 3D. Pour l'assemblage, par contre, la dextérité humaine reste indispensable. C'est à ce moment que notre professionnalisme et notre expérience entrent en jeu.
“Nous ressentons toujours l'envie de pousser le souci du détail encore un peu plus loin.”
Vous considérez également que les clients de D'Ieteren Luxure Performance sont vos clients…
Roland D'Ieteren est un personnage qui a énormément compté dans l'histoire de Suber Factory. Il adorait venir à l'atelier, s'imprégner de l'atmosphère et nous regarder travailler. Cet homme respirait la passion et l'automobile. Roland D'Ieteren était également un visionnaire toujours en avance sur l'histoire.
Auriez-vous également un moment "automobile" inoubliable à partager ?
La livraison chez Lawrence Stroll reste un grand moment. Un homme réputé pour être très dur en affaires. Nous avons rendez-vous à Londres, dans le quartier des milliardaires. Le créneau qui nous est alloué est très court, les photos sont interdites. Quand il arrive, le silence s'installe, ses collaborateurs se taisent. Et dès qu'il voit la voiture, la glace brisée. Il nous a parlé de son fils, de F1, nous avons fait plein de photos… un moment incroyable. Sa secrétaire a même dû lui rappeler que son prochain rendez-vous l'attendait déjà !
De nombreuses personnalités ont fait appel à vos services…
Et souvent, quand on parvient à percer la carapace "publique" que ces personnes sont obligées de se construire, le dénominateur commun entre elles est l'humilité. Ce fut le cas avec Jean Todt, John Shirley, Ralph Lauren, Sebastian Vettel, le comte van der Straten… Nick Mason, batteur de Pink Floyd, m'a félicité en tant qu'artiste, ajoutant que lui ne faisait que "taper sur des tambours"…
Nos lecteurs peuvent-ils déposer leur liste d'anniversaire chez vous ?
(rires) Oui. S'ils sont Belges, collectionneurs, passionnés et qu'ils nous laissent travailler librement, leurs candidatures seront reçues avec grand plaisir ! Comme me le disait Roland D'Ieteren : "un jour, les Américains viendront dans votre atelier". C'est aujourd'hui le cas, mais jamais nous ne délaisserons nos clients belges.
“Notre objectif : faire persister notre artisanat et développer une clientèle belge.”
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